L’abbaye de Lesterps trouve son origine dans l’ancienne église de Stirpis. Selon la tradition, vers l’an 975, Jourdain Ier de Chabanais y aurait établi une communauté de chanoines. Cependant, les premières sources fiables concernant ce lieu n’apparaissent que plus tard. Vers 1030, Gautier, venu de la communauté canoniale du Dorat (Haute-Vienne), y introduisit la règle de saint Augustin.
Vers 1040, Jourdain II, fils du fondateur, en désaccord avec l’abbé Gautier, profita de son absence — ce dernier étant peut-être en pèlerinage en Terre sainte — pour s’emparer du monastère. En représailles, Adalbéron II, comte de La Marche, attaqua les lieux, provoquant leur destruction et la mort de nombreux chanoines. Après avoir obtenu le pardon du pape, les responsables du désastre entreprirent la reconstruction et la dotation de l’église. En 1070, Gautier lui-même put consacrer la nouvelle église, qui fut bénie en 1091. Gautier serait mort cette même année 1070 et fut enterré dans l’église, où il fut vénéré comme saint.
L’abbaye de Lesterps connut une période de prospérité et participa à la fondation ou à la réforme d’autres communautés canonicales, telles que Notre-Dame de Celles (1095) et Saint-Pierre d’Airvault (1096), toutes deux dans les Deux-Sèvres, ainsi que Saint-Émilion (Gironde), vers 1110, entre autres. À partir de 1110, sous l’abbatiat de Ramnulfe, l’église fut considérablement agrandie avec l’ajout d’un transept et d’un chevet avec déambulatoire et chapelles rayonnantes.
En 1567, dans le contexte des guerres de Religion, le monastère fut attaqué, pillé et incendié, et tomba en ruines. Sa restauration fut menée par l’abbé Charles-François de La Vieuville (1657–1676), qui favorisa également son affiliation à la congrégation de Sainte-Geneviève. La communauté canoniale fut supprimée à la Révolution.
Le culte paroissial reprit en 1803, bien que l’état de l’édifice fût très dégradé : il n’était plus utilisé depuis 1738, et au XIXe siècle, il tomba en ruine. Le chevet, le transept et une partie de la nef furent perdus. Aujourd’hui, on conserve en gros les trois travées des nefs datant de l’époque de Gautier : une nef centrale large flanquée de bas-côtés très étroits. Le chevet actuel est une reconstruction moderne. L’élément le plus remarquable de l’ensemble est la puissante tour-clocher, également de la première époque, qui s’élève au-dessus d’un porche.
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