En l’an 1101, sous le pontificat du pape Pascal II, les chanoines augustiniens de l’abbaye de Saint-Pierre de Cellefrouin (Charente) furent contraints d’adopter la règle bénédictine et placés sous l’autorité de l’abbaye de Charroux (Vienne). Vers 1120, l’abbé Foucault, considéré comme un disciple de Robert d’Arbrissel, en désaccord avec ce changement, quitta Cellefrouin et s’établit à Fons Cancellatus, dans des conditions précaires.
Autour de lui, plusieurs ermites se rassemblèrent, formant progressivement une nouvelle communauté. En 1128, avec le soutien de l’évêque de Périgueux, la construction d’une église commença, et en 1131, l’autel fut consacré, bien que les travaux ne fussent achevés qu’au milieu du siècle. En 1133, la communauté fut officiellement érigée en maison monastique, adoptant la règle de Saint Augustin, à l’instar de l’ancienne abbaye de Cellefrouin. La nouvelle abbaye reçut plusieurs donations, notamment le domaine de Merlande (vers 1140), où fut établi un prieuré. Elle contribua également à la fondation de l’abbaye de Notre-Dame des Fontenelles (Vendée) et d’autres établissements, formant ainsi la congrégation de Chancelade.
Sa prospérité ne cessa de croître et, en 1175, elle obtint son indépendance de l’évêque, passant sous l’autorité directe du Saint-Siège. Cependant, au cours de la première moitié du XIVᵉ siècle, elle entra en déclin, aggravé par la guerre de Cent Ans : l’abbaye fut occupée, les chanoines expulsés et le monastère transformé en garnison militaire. Vers 1440, la communauté se reconstitua, mais elle fut à nouveau frappée par les conflits, cette fois en raison des guerres de Religion. En 1575, l’abbaye fut pillée et incendiée.
Malgré cette nouvelle épreuve, l’abbaye renaquit et ses pratiques monastiques furent réformées. En 1638, l’église restaurée fut consacrée et, en 1660, de nouvelles constitutions furent adoptées pour la congrégation, qui poursuivit son activité jusqu’à la Révolution française. À cette époque, elle intégra même la domerie d’Aubrac (Aveyron). Finalement, en 1790, l’abbaye fut supprimée et les moines furent expulsés, laissant le site livré au pillage.
De l’abbaye subsiste l’église médiévale, bien que profondément modifiée à l’époque moderne. Elle présente une nef unique avec un transept, et son chevet a été reconstruit. Les murs de la nef sont conservés, mais les voûtes furent reconstruites en 1630. Quant au mobilier, on y trouve des vestiges de décorations murales des XIIIᵉ et XIVᵉ siècles, ainsi qu’un chœur avec stalles du XVIIᵉ siècle. Le palais abbatial, d’origine médiévale, est également préservé, bien que fortement remanié au fil des siècles.
Peintures murales (XIIIe-XIVe siècles)
Photographie de Benjamin Smith, sur Wikimedia
Palais abbatial
Photographie de JLPC, sur Wikimedia
- BAUDRILLART, Alfred (1953). Dictionnaire d'histoire et de géographie ecclésiastiques. Vol. 12. París: Letouzey et Ané
- BESSE, J.-M. (1910). Abbayes et prieurés de l'ancienne France. Vol. 3: Provinces ecclésiastiques d'Auch et de Bordeaux. Abbaye de Ligugé
- BOISSERIE, Florence (2021). Chancelade - Abbaye, logis de l’abbé. Archéologie de la France
- CORVOISIER, Christian (1999). Chancelade. Abbaye Notre-Dame. Congrès archéologique de France. 156e session. Périgord. París: Société archéologique de France
- DE LA ROCHE, J. D. (1854). Notice sur l'abbaye de Chancelade. Le Chroniqueur du Périgord et du Limousin, núm. 2. Périgueux
- DESHOULIÈRES, François (1928). Chancelade. Congrès archéologique de France 90e session. Périgueux. París: Société française d'archéologie
- PELLICCIA, Guerrino; dir. i altres (1975). Dizionario degli istituti di perfezione. Vol. 2. Roma: Ed. Paoline
- SAINT-MAUR, Congregació de (1720). Gallia Christiana in provincias ecclesiasticas distributa. Vol. 2. París: Typographia Regia
- SECRET, Jean (1978). L’abbaye de Chancelade en Périgord. Périgueux: O.D.T. Dordogne
Chancelade est située à l’ouest de Périgueux, tout près de la ville